Caroline von Schelling, Band 1


An Julie von Studnitz.

à Goettingue ce 17 de Mars 1780.

... J’ai reçu des lettres de mon frere, et c’est moi Seule qui en a recu. Il écrit dans le moment de son embarquement pour une expedition sous le General Clinton qu’on croyoit alors destinée pour Carolina (das selige Land, daß deinen Nahmen führt, ce sont les mots de mon frere, und wo es mehr Ananas giebt als bey uns Cartoffeln), mais on a vu depuis par les gazettes qu’elle est debarquée à l’isle St Lucie. Vous vous rejouirés avec moi de la défaite des fiers Espagnols et de la perte des François. Vous, par inclination pour les Anglois et par amitié pour moi, et moi par patriotisme et en égard de l’esperance, de revoir bientôt mon frere aprés la guerre finie. On a parlé ici beaucoup de la paix suivant quelques lettres que nos Anglois ont reçu, mais ce bruit ne paroit pas fondé. Un grand transport de Hessois seront embarqués la semaine suivante.

A la prière de mon frere nous lui avons envoyé quantité de choses, du vin, des habits, de la medecine etc. Je lui ai fait présent, outre tout cela, de toute la celebre querelle de Mr. Kästner et Zimmermann, qui vous sera connue. de suis curieuse de voir si Zimmermann repondra encore une fois, ou s’il fera ce que tous les deux auroient du faire, se taire. Si par hazard Vous ne l’aussiés pas encore lu, Madame Schlaeger Vous le donnera avec plaisir. Mon frere s’en amusera surement, il m’a prié de lui donner quelque fois des nouvelles de l’histoire scandaleuse de Goettingue.

Demain nous aurons le dernier concert, et ce sera la Passion de Graun, la poésie est de Rammler. C’est tout ce qu’on peut voir d’exellent et de touchant en musique et je sais que Vous en serés enchantée, je le suis, quoique je ne soye pas connoisseur. Je l’ai deja entendue plusieurs fois, mais toujours avec un plaisir nouveau. Pendant cet été nous aurons aussi tous les quinze jours des concerts. Aprés Paques, on attend Mlle. Preyssing ici. Quelques uns de nos messieurs s interressent si vivement pour elle, qu’ils ont tout employé à la faire venir ici.

Les noces de Mlle. Stieler sont si proches, que le tems me manque pour faire des préparatifs pour le voyage, sans cela — — ah ma tendre Julie, ne le croyés pas, je ne serois venue en aucun cas. C’est une chose tout à fait impossible....